jeudi 29 novembre 2012

Romance à Portsmouth -3- Helena


En descendant pour prendre mon petit déjeuner le patron me prévins qu’une jeune demoiselle était passée ce matin et qu’elle me faisait dire qu’elle m’attendrait ce midi au pied du phare pour un déjeuner champêtre. Je fus surpris de savoir qu’elle était déjà au courant de ma présence alors que je ne l’avais pas prévenu de ma visite. Le patron me voyant stupéfait me rassura en m’indiquant que le village entier était déjà au courant de mon arrivée. Il me confirma que les gens du coin n’avaient pas l’habitude de voir des étrangers et qu’ils étaient très superstitieux. Je lui demandai s’il lui était possible de me préparer de quoi déjeuner dehors ce midi et il m’indiqua que la demoiselle avait déjà tout prévu. Avant que j’ai eu le temps de l’interroger sur Helena il disparu en cuisine me laissant seul avec mes questions. N’ayant rien de particulier à faire le matin je restai dans ma chambre à travailler mes notes. La matinée passa rapidement et l’heure du déjeuné arriva bientôt. Je sorti sous un ciel dégagé dans une fin de matinée ensoleillée et agréable. Une légère brise apportait les embruns et une multitude d’oiseaux planaient doucement au dessus de nos têtes. La lumière était douce et le soleil jouait à cache-cache avec les rares nuages. Je flânai le long du port en attendant la demoiselle quand un appel dans mon dos me fit sortir en sursautant de ma rêverie. Plein d’appréhension je me retournai doucement et découvrir une ravissante demoiselle d’une vingtaine d’année une main tenant son chapeau et l’autre soutenant un panier remplis. Elle portait une robe finement ouvragée de couleur bleue pâle dont la jupe comportait nombreux voilage tous parfaitement ajustés entre eux ainsi qu’un corsage brodé mettant en valeur les lignes généreuses de son corps menu de femme citadine. Ma première impression fût que son raffinement et son élégance tranchait avec ce lieu plutôt modeste et terne. Il ne fît aucun doute pour moi qu’elle ne pouvait qu’habiter le vieux manoir dont je m’étais approché hier soir. Elle m’adressa un sourire radieux en me saluant. Je lui rendis son bonjour en lui exprimant ma surprise de la voir m’attendre alors que je ne l’avais pas prévenu de ma visite. Elle me dit qu’elle avait été prévenue de mon arrivée et qu’elle s’attendait depuis quelques temps à ce que je lui rende visite. Je lui fis mile compliment quand à sa beauté, sa tenue et sa charmante attention me désolant de me comporter comme le dernier des rustres en arrivant ici sans prévenir ni organiser mon arrivée. Elle se mit à rire avec légèreté et me posa un baiser sur la joue en me répondant que mon désir de lui rendre visite était la plus charmante des attentions et qu’elle excusait pleinement mon empressement. Elle m’indiqua que le meilleur endroit pour déjeuner était la pointe du vieux phare d’où nous pourrions avoir une magnifique vue sur la baie et le village. J’acquiesçai en lui et lui proposa fort galamment de la soulager de son panier. Nous marchâmes tous deux vers le vieux phare le long de la corniche par un vieux sentier courant irrégulièrement entre les buissons. Je me rendis vite compte que j’avais eu raison de ne pas m’aventurer de nuit ici. Nous passâmes le chemin à discuter de la région. Malgré les nombreuses informations dont elle m’avait déjà fait part par écrit elle regorgeait encore de petites anecdotes et me fît observer tant de curiosité, de points de vue sur des détails du paysage que je me dis qu’elle avait dû passer toute son enfance à parcourir les alentours du village. Tout en continuant de l’écouter j’essayais de l’imaginer enfant. Elle avait dû être une petite fille espiègle mais capable de la plus grande écoute et du sérieux propre aux adultes quand il le fallait. Elle était ravissante et sa conversation était délicieuse. Nous arrivâmes sans nous en rendre compte au pied du phare. A l’inverse des alentours du manoir, la corniche était ici complètement dégagée et une prairie parsemée de rochers couvrait la colline. Un arbre unique et centenaire trônait au milieu de ce lieu idyllique, un vieux cèdre au branchage tordu et malmené par les éléments qui en faisait un nœud compact de branches solides, vision qui me fît penser à la structure même du village : ramassé et prêt à affronter toutes les agressions extérieurs.

Nous nous installâmes à son pied et j’étendais la couverture pendant qu’Helena vérifiais le contenu de son panier. Elle avait préparé un délicieux repas et je me régalais. Ne la voyant toucher à rien elle m’expliqua qu’elle était malade et qu’elle avait suffisamment déjeuné ce matin pour tenir la journée. Je m’inquiétais sur sa santé mais elle esquiva la conversation en me demandant ce que je pensais de leur village. Je commençais par regretter l’austérité des villageois sans doute du à l’isolement du village et voyant que ces critiques l’attristait j’enchaînai rapidement sur la beauté du paysage et la conservation de la côte sauvage. Elle me sourit de nouveau à ces paroles et je réalisai que je ne souhaitais plus rien d’autre que de la faire sourire. Elle m’expliqua qu’en dépit de leur froideur extérieure les habitants du village étaient solidaires et généreux. Ils étaient tout simplement craintif de ce qui venait de l’extérieur et craignaient que la tranquillité de ces lieux se perde un jour, dénaturé par quelques étrangers. C’est pourquoi ils rejetaient tout contact avec l’extérieur.  En fin de repas alors que je me roulais une cigarette adossé au vieux cèdre elle rosi légèrement en m’interrogeant sur les motivations de ma visite. Je pris une longue inspiration, le temps de juger qu’il était trop tôt pour lui dire que j’étais venu uniquement pour elle, puis lui répondit que je souhaitais voir de mes propres yeux ce village sur lequel je passait tant de temps d’étude et que cela me permettais de lier l’utile à l’agréable en lui rendant enfin visite après une si longue correspondance. Elle sourit timidement comprenant mes vrai motivations puis resta pensive le regard flottant dans l’étendu maritime. La laissant à sa réflexion j’observais en détail le phare. C’était une vieille construction solidement arrimée au promontoire rocheux. La végétation s’étendait à son pied sans pour autant envahir sa façade comme si la nature acceptait sa présence et s’en accommodait. Une volée de marche conduisait à une solide porte. D’après ce qu’il pouvait voir les murs avaient l’air très épais et il ne doutait pas que le vent devait être rude ici lorsque les éléments se déchainaient. Pas de fenêtres mais de petites ouvertures faisant penser à des meurtrières de château fort apparaissaient de part et d’autre de l’édifice. Au sommet un plateau et une poulie indiquaient qu’à l’origine le phare fonctionnait au bois. Remarquant mon intérêt pour le bâtiment, Helena m’indiqua qu’il s’agissait à l’origine d’une tour à feu construite pour éclairer la nuit le retour des bateaux de pêches rentrant tardivement de la pêche. La structure avait été conservée pour le remplacement du bucher par une lampe de phare plus moderne. Elle m’expliqua que l’originalité de ce phare était de fonctionner à partir d’une génératrice à bois. Cette fonctionnalité avait été décidée par les habitants, officiellement pour conserver la mémoire de la tour à feu. Officieusement ils voyaient d’un mauvais œil le passage régulier de citernes de fioul qui serraient venues ravitailler le phare. Le phare était actuellement habité par deux frères qui se relayaient chaque soir pour surveiller son bon fonctionnement. Helena se mît à rire quand je lui demandai si ils vivaient tous deux à l’intérieur d’un endroit qui paraissait si sinistre et m’indiqua qu’ils vivaient dans la dernière maison de ce côté ci du village. Elle me promit de m’emmener un jour visiter l’intérieur du phare afin de me rendre compte par moi-même qu’il était impossible d’y vivre. Lorsqu’elle vît que je contemplais la falaise en direction du manoir elle me proposa d’aller faire une ballade en barque au pied des falaises. J’acquiesçai et nous redescendîmes tranquillement au village.

Nous passâmes l’après midi tranquillement en bordure de mer. La mer était calme et je pouvais conduire la barque assez facilement. Comme Helena l’avait dit la vue en contrebas des falaises était magnifique et elle me fît visiter de nombreuses petites grottes creusées par les marées. Ces petites niches ressemblaient à des cavernes fantastiques regorgeant d’historie de piraterie et de contrebande. On imaginait des forbans de tous temps surveiller l’entrée de leur repaire. Elle me raconta qu’elle avait été une enfant espiègle et avide d’exploration. Elle avait inspecté durant ses jeunes années chacune de ces cavités et elle n’y avait malheureusement trouvé que ce que son imagination y inventait. Mettant constamment ses parents dans l’inquiétude elle n’avait eu de cesse de découvrir tous les petits bijoux que pouvait receler ce lieu idyllique. Je fini par lui avouer que je trouvais moi-même ce lieu des plus charmants. 

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